Syracuse

<p><strong>Un portrait impressionniste du "prince du cool", comédien culte et fils spirituel de Keaton, dont la carrière à éclipses et l’imprévisibilité continuent à nourrir le mythe. </strong></p> <p>&nbsp;</p> <p>Partir en quête de Bill Murray, 68 ans, comédien à la mélancolie existentielle et au potentiel comique hors norme, c’est un peu comme chasser le dahu&nbsp;dans les Alpes&nbsp;: une mission impossible pleine de promesses. La notice biographique du "pape du cool" fournit quelques repères&nbsp;: les origines catholiques irlandaises, la famille nombreuse (huit frères et sœurs), l’enfance dans le pavillon le plus modeste d’une banlieue chic de Chicago et le talent précoce, et redoutable, pour l’improvisation, dans l’ombre d’un aîné comédien. Imprévisible – consommateur invétéré de cannabis, il est arrêté à 20 ans pour avoir convaincu les passagers d’un vol qu’il transportait des bombes. Cet électron libre trouve, aux côtés du survolté John Belushi, mort à 33 ans, et de Harold Ramis, futur réalisateur de l’iconique <em>Un jour sans fin</em>, avec lequel il se fâchera au cours du tournage, des acolytes à sa démesure. De la troupe trash du <em>National Lampoon</em> au show TV loufoque <em>Saturday Night Live</em>, ces pionniers subversifs du stand-up osent tout, secouant férocement l’Amérique des <em>seventies</em>. Mais starisé, dans les années 1980 par la comédie hollywoodienne (<em>Meatballs</em> ou, surtout, <em>SOS Fantômes</em>), Murray déprime, d’autant que <em>Le fil du rasoir</em>, adaptation du roman de Somerset Maugham, dans lequel, en moine bouddhiste, ce misanthrope trouve un écho à sa propre quête spirituelle, fait un flop. Il disparaît alors des écrans radars et se réfugie un temps à Paris, étudiant incognito à la Sorbonne et assouvissant une passion nouvelle pour Keaton à la Cinémathèque.<br/> <br/> <strong>Incontrôlable</strong><br/> Aujourd'hui, l’acteur culte promène, avec une fausse désinvolture, sa silhouette de géant impassible dans le meilleur du cinéma, du sur mesure <em>Lost in translation</em> de Sofia Coppola au burlesque poétique de son désormais frère d’âme Wes Anderson. Mais à ses heures, l'amateur de karaoké va taper l’incruste dans un mariage ou un colloque lambda, au nom de sa délirante tournée "Bill Murray can crash here", qui provoque l’hystérie collective. C’est ce phénomène, idole flegmatique à la vie privée chaotique, que tente de saisir Stéphane Benhamou, au fil d’archives et de témoignages, en se réjouissant in fine que l’irrésistible héros de <em>La vie aquatique</em> lui échappe, comme à tout contrôle et à toute définition. Car son film montre surtout combien Bill Murray reste, envers et contre tous, le seul auteur de sa légende et le génial orchestrateur de son énigme.</p>